En 2009, le président américain prenait, au Caire, l’engagement de répondre aux "aspirations légitimes" des Palestiniens. Sa prochaine visite à Jérusalem lui offre l’occasion d’honorer enfin sa promesse.
De l’issue de la prochaine visite de Barack Obama, les 20 et 21 mars, en Israël dépendra la place du président des États-Unis dans l’Histoire. Soit il saisit cette occasion unique - sans doute la dernière - pour ressusciter la solution moribonde de deux États, soit il enterre les derniers espoirs des Palestiniens de voir naître un État viable, laissant l’image d’un pleutre qui aura capitulé devant des considérations politiques partisanes et étroites.
Comme aucun autre président américain avant lui, Obama est aujourd’hui en mesure de tracer les contours de l’avenir d’Israël et de ses relations avec ses voisins. Quelles que soient les pressions - et elles sont fortes - exercées par les partisans de l’État hébreu aux États-Unis, la décision ultime lui appartient, à lui et à lui seul. Il est le président de la première puissance mondiale et a réussi à se faire réélire pour un second mandat de quatre ans, ce qui lui confère un supplément d’autorité morale et politique. Mieux : contrairement à la plupart de ses prédécesseurs, il sait parfaitement ce qu’il faut faire au Moyen-Orient, comme l’a montré son discours du Caire, le 4 juin 2009. Il convient de rappeler ses paroles à cette occasion. « La situation des Palestiniens est intolérable. L’Amérique ne tournera pas le dos aux aspirations légitimes des Palestiniens à la dignité, à des perspectives d’avenir et à un État. La seule solution est de répondre dans le même temps aux aspirations des deux parties à travers deux États vivant côte à côte en paix et en sécurité. C’est dans l’intérêt d’Israël, de la Palestine, de l’Amérique et du monde. C’est pourquoi j’ai l’intention de poursuivre personnellement cet objectif avec la patience qu’une telle tâche requiert. »
Le temps est venu pour Obama de tenir son engagement. Il sait que seule la puissance américaine peut mettre un terme à la spoliation des terres palestiniennes par des colons juifs messianiques et par leurs alliés de la droite nationaliste. Cette colonisation ruine progressivement l’espoir des Palestiniens de voir naître un jour leur État et menace, par là même, l’avenir d’Israël en tant qu’État démocratique. Obama prononcera-t-il un discours sur la place Itzhak-Rabin ? Osera-t-il dire aux Israéliens que les relations privilégiées entre l’Amérique et leur pays - vitales pour l’État hébreu - pourraient être remises en question si la confiscation de terres n’était pas gelée, puis inversée, ouvrant la voie à la création d’un État palestinien ?
Partialité
Quelles sont les chances de voir Obama dire aux Israéliens que leur comportement menace les relations vitales qu’entretient l’État hébreu avec l’Amérique ? Minimes, si l’on songe que le président des États-Unis s’est laissé humilier par Netanyahou quand celui-ci refusa de geler la colonisation. Étrangement, Obama semble même être tombé sous le contrôle d’Israël, du moins pour tout ce qui touche au Moyen-Orient. Comme l’écrit le professeur Fawaz Gerges, de la London School of Economics and Political Science, dans son dernier livre, Obama and the Middle East (« Obama et le Moyen-Orient »), « les États-Unis ne sont plus perçus comme omnipotents et invincibles ». Ajoutant que les guerres américaines « ont réduit la puissance et l’influence des États-Unis au Moyen-Orient et dans le système international ». Israël aurait-il la mainmise sur les prises de décision de l’Amérique ? Plusieurs signes le laissent à penser. Il y a quelques jours, l’International Herald Tribune accordait une large place à une diatribe incendiaire digne d’un propagandiste israélien. L’auteur n’était autre que Tom Donilon, conseiller à la sécurité nationale d’Obama. Dans son article, il imputait au Hezbollah l’attaque « méprisable » dont ont été victimes des touristes israéliens en Bulgarie - alors qu’on ne disposait d’aucun élément étayant cette thèse -, appelait la communauté internationale à reconnaître « la nature infâme » du mouvement de résistance libanais et pressait l’Union européenne d’ajouter le Hezbollah sur sa liste des organisations terroristes. Une partialité aussi crasse n’est pas digne d’une grande puissance comme les États-Unis. Mais peut-être que « nous sommes en train d’assister, comme l’écrit Fawaz Gerges, au début de la fin du momentum américain au Moyen-Orient ».